Madame Mourani vient d’avoir une révélation : la Charte canadienne. Elle a vu la lumière au bout du tunnel, elle a reçu l’appel de sa nouvelle foi. Il ne lui manque qu’une religion: un parti politique fédéral. Les subterfuges sont légion en politique, mais le glissement de siège est moins élégant lorsqu’on fait constamment des éclats pour faire passer ses idéologies personnelles avant celles du parti. Et ce départ rugissant aura simplement encore contribué à diviser notre société. Madame Mourani par son ambition à trouver un parti où faire passer ses idées croyait hier être la star immigrante souverainiste qui sera demain la star immigrante fédéraliste et multiculturelle. Là où elle croit voir son étincelle briller, elle ira. En cela, si madame Mourani espère des mains tendues des autres partis fédéralistes, avec cette réputation qui la précède, elle risque de se retrouver comme indépendante aux prochaines élections.

Les effets de la charte canadienne

Rappelons que la Charte ne donne pas des droits, mais bien des privilèges. Même la Cour Suprême n’est pas obligée d’accepter les demandes d’accommodements religieux. Mais on se demande jusqu’où elle ira, puisqu’elle est en train de se pendre avec la corde qui donne du lousse à une certaine immigration religieuse extrême.

La Cour Suprême a créé plusieurs injustices auxquelles Québec n’a jamais dit non explicitement, ni oui tacitement: les signes visibles valorisent la présence de deux grandes religions, juive et musulmane, et toutes les autres libertés de conscience sont d’emblée non représentées au sein de l’État car invisibles. Ces mêmes signes reflètent l’idée de soumission de la femme et les accepter par le biais des emplois de l’État donnerait à croire que cette suprématie de l’homme est valable, car l’État la validerait. De plus, les signes ostentatoires font par défaut la propagande à la fois du sexisme et des intégristes qui ont détourné les symboles musulmans vers une secte islamiste.

Poursuivre cette vision multiculturelle encourage la division entre les gens par races qui se construisent une identité autonome dans le creuset de quelques rues où ne passent pas qui veut. Celles-ci deviennent éventuellement une ville, voire une petite nation indépendante dont les citoyens refusent de respecter les lois de la majorité, habitués qu’ils sont aux traitements de faveur (voir cet article). Ils vendent ainsi leurs maisons aux leurs, faisant par là de la discrimination raciale, mais pour laquelle on n’aura jamais le droit de les accuser, contrairement à la majorité. On appellera donc la majorité raciste dès qu’elle osera toucher aux privilèges des minorités devenues capricieuses et qui, par cet abus de privilège, nous forcent parfois avec beaucoup d’agressivité à accepter que leur communauté se referme sur elle-même. Qui est raciste dès lors que la majorité a toujours fait la preuve de sa capacité à se métisser? Devons-nous nous excuser de déranger le confort d’une communauté à qui l’on demande à son tour un effort d’intégration à l’instar de milliers de Québécois d’autres nations?

Le multiculturalisme canadien est malin

Voilà où nous conduit la Ô divine Charte canadienne. Vers le clivage, la séparation en groupuscule, vers la division, la haine, l’intolérance et le racisme. Ce multiculturalisme qui a pris au piège tout le monde occidental a été construit au Canada d’une manière perverse: Trudeau a fait d’un droit coutumier une loi en enchâssant la charte dans la Constitution. Il a fixé la mouvance à venir de la société dans le moyen-âge, dans une conscience tribale, ramenant le religieux à l’avant-scène sans que jamais nous ne puissions en sortir. Satan n’aurait pas fait mieux pour aliéner l’identité intrinsèque et universelle de l’humanité.

Voilà le serpent à qui madame Mourani vient de baiser le pied. Il est étonnant venant d’une avocate de voir le manque de profondeur avec lequel elle suggère explicitement et radicalement que le Québec jette à la poubelle sa Charte des droits et libertés, née en 1977 soit quatre ans avant la charte canadienne. C’est méprisant, insultant, gratuit et surtout un manque d’intelligence que de ne pas voir l’immense fossé qui sépare les deux chartes et donc les deux nations dans ce qu’elles ont de plus irréconciliable: l’humain se juge nu ou se juge habillé? La Charte québécoise est basée sur le droit naturel, à savoir l’humain sans religion ni coutume, l’homme nu face à sa nature. C’est ça un Québécois, peu importe son origine.

Le droit romain, socle du Juste et du vrai au Québec, a construit notre identité. Et le droit anglo-saxon pour qui prédomine la coutume ne fait pas partie de notre instinct du juste. C’est la raison pour laquelle le Québec a du mal à se reconnaître dans cette justice de surface. Le droit canadien tel que pratiqué actuellement dépossède l’identité humaine de sa nature intrinsèque pour n’en considérer que la surface, le costume. Ainsi l’ostentatoire, comme preuve technique pour démontrer le degré d’importance d’une croyance invisible et supposément personnelle, est incohérent pour quiconque comprend ses dimensions humaines en elles-mêmes.

Or dans nos consciences évoluées, la société québécoise n’a plus besoin de lois pour tolérer toutes les expressions de culte dans la vie privée. Par contre, elle a besoin de balises pour contrer les excès des croyants qui, pour tout et rien, en demandent toujours plus et laissent passer par la porte d’en arrière le sexisme et l’intégrisme religieux.

Le droit et Dieu

Le droit exerce une puissante influence sur la psyché collective en ce qu’il peut punir, tout comme un Dieu. Et agissant comme une loi, la Charte canadienne parvient à convaincre de plus en plus de Québécois qu’un culte vaut plus qu’un être humain. Pourquoi de nombreux Québécois se convainquent des bienfaits de la Charte canadienne? Parce qu’ils ont peur d’être sanctionnés s’ils désobéissent à la morale canadienne. Or, comment pourrons-nous évoluer vers une conscience universelle où les murs des ghettos tombent pour faire circuler librement tous les individus ? Comment évoluer donc dès lors que nos lois nous obligent constitutionnellement – voire à tout jamais – à fixer notre psyché dans un passé tribal où le sentiment d’appartenance domine celui de s’appartenir en propre ? Où est l’individu qu’une charte des droits individuels est supposée défendre lorsqu’il exige des accommodements issus d’une secte, d’une religion, d’une intention qui sert une communauté devenue plus puissante que la majorité par les privilèges dont elle abuse ?

Voilà l’illumination de madame Mourani. Et j’aurai le plaisir de ne pas voter pour elle.