C’est curieux de voir que finalement en Occident, il n’est permis de rire que des chrétiens. Il serait plus que temps que ceux qui se réclament de notre citoyenneté s’incluent dans notre très grande capacité d’autodérision.
J’ai vu plusieurs fois Dieudonné en spectacle. Peut-être que certains y voient de l’antisémitisme, mais en fin de compte l’humoriste donne dans le 3e niveau et tente plutôt de dénoncer globalement les stratégies des maîtres du monde. Il va sans dire qu’une élite juive s’est historiquement trouvée derrière la création de nombreux systèmes qu’ils ont su concevoir avec éloquence. Évidemment, cette influence juive dans l’Occident leur a octroyé une place de choix dans les hautes sphères du pouvoir invisible: médias, finances, cinéma, lobby. Évidemment, quand on voit un ministre français tracer un trait juridique aussi rapidement à la liberté d’expression, on se dit qu’il ne peut pas avoir fait ça sans la pression du lobby juif. C’est un geste très malheureux et lourd de conséquences. Et puis on se dit qu’il vient de créer un grave précédent: le ministre vient de démontrer qu’on pouvait régler des problèmes rapidement rien que par la volonté politique, en 3 heures ! La pression va-t-elle monter d’un cran sur la classe politique?
Maintenant que les choses se sont calmées pour les Juifs, voilà que l’Islam se sent à son tour visé par l’Occident. Et le concours de victimes a repris de plus belle: on nous taxe d’islamophobes à la moindre remarque. Les intégristes ne rigolent pas. Mais les intégristes sont-ils les gens avec qui nous vivons tous les jours? Ben justement, on le sait pas, d’où une certaine méfiance sans être une phobie.
Mais ce dont on est certains au Québec, c’est qu’il faut parfois délier les tensions par le rire. Et ça la France vient de l’oublier: on ne rigole pas avec les Juifs! Aille! Si les Québécois comptabilisaient le nombre de fois où ils subissent du mépris, où on ridiculise leurs blessures passées, tous les jours ils seraient très occupés. Des critiques à propos du peuple québécois, on en mange à la pelle et on ne dit rien. Pourquoi? Parce que ça ne vaut pas la peine de se défendre contre un préjugé. Les blessures ne se comptabilisent pas et elles sont incomparables. Ce qui vaut la peine, c’est nourrir l’esprit pour élever tous ensemble notre condition humaine.
Savoir rire de soi, les Québécois savent faire. Et franchement, ça ferait du bien à tout le monde si les Juifs et les musulmans apprenaient à laisser couler l’humour fait sur leur dos sans y voir à chaque virgule un sentiment de haine ou de racisme à leur endroit. Ils devraient commencer à relativiser ces traits que l’humour grossit juste pour dérider nos différences.
Avoir de l’esprit allège le cœur. Et c’est peut-être ça aujourd’hui qui pèse sur Dieudonné : faire rire ne soulage plus son cœur. Ça, c’est très grave. Mais toute la France a cessé de rire en même temps que le ministre qui bâillonne et plante le clou du mal du siècle : la politicocynose.
Pour la suite de 2014, souhaitons aux Français de ne pas faire dérailler davantage leur liberté d’expression et leur sens de l’humour. Sans cette capacité d’autodérision de toutes les constituantes d’une nation, sans ce consensus du rire, il n’y a plus que tensions, paranoïa, concours de victimes. Les chrétiens ne peuvent pas être la seule cible de notre humour collectif puisque dorénavant les trois religions vivent ensemble en Occident.
Le peuple du Québec est festif. Dans la tempête, il chante. Devant les insultes, il courbe l’échine. Devant le mépris, il se recueille. Et devant les différences, il fait de l’esprit pour trouver la lie qui nous lie et rire tous ensemble. De là naît une complicité. C’est ce que je nous souhaite, à nous, les Québécois pour 2014. Un grand show d’humour où personne n’épargne personne !
Juifs et musulmans auraient non seulement avantage à s’accommoder à notre humour raisonnable, mais aussi à y contribuer : nous montrer qu’ils peuvent rire d’eux-mêmes autant que de nous et qu’ils sont prêts à ce que nous fassions de même juste pour diluer la lie. Car comme on dit chez nous : « Si tu ne vaux pas une risée, tu ne vaux pas grand-chose ! »