Définir l’identité à partir d’une coutume, d’une croyance, d’une culture ou d’un code vestimentaire réduit l’humain à sa plus simple expression. Bien plus grand qu’une forme, nous sommes avant tout un rayonnement que le siècle des lumières a réussi à révéler à notre raison mais que nous n’avons pas encore exploré comme mode de vie. Cette intelligence va bien au-delà de tout ce que nous pouvons imaginer.
Avoir de l’identité, c’est se savoir être. Défendre son identité sur la base d’une religion relève de l’incapacité à se savoir exister, seul, au centre de sa conscience. Si les religions ont fait office de repère identitaire à ce jour, c’est que notre niveau de conscience trop étroit ne parvenait pas à nous individualiser réellement. Cette inconscience est toujours au pouvoir, dans nos institutions, tandis que les gens s’éveillent, un à un.
De la religion ont découlé des rites, des croyances, des superstitions. Ces expressions ne relèvent pas de l’identité mais bien de la peur et du doute à se savoir capable de diriger sa vie en tant que soi-même. Elles ont donné naissance à la culture du sacré puis à la culture populaire que nous connaissons aujourd’hui. Cette expression culturelle ne relève pas non plus de l’identité.
La culture issue de notre lointain passé religieux a pour vocation le réconfort de l’âme. Elle parle de sa condition de mortel et du désir de se connecter. Mais à quoi ? La culture ne répond pas à cette question. Nous acceptons de cautionner une culture ou une autre parce qu’elle nous réconforte, non parce qu’elle est intelligente.
Nous avons commencé à danser pour invoquer le dieu de la pluie, à chanter pour implorer le ciel de nous donner des récoltes généreuses. Avec la parole, nos chants sont devenus prières. Et nous avons pu, sans musique, adresser personnellement nos demandes à une force dite supérieure dont nous n’avons jamais eu les moyens de démontrer l’existence.
Nous avons besoin de la culture du sacré pour invoquer. Sacralisés par les arts, les chants et la danse nous réconfortent parce qu’ils provoquent le souvenir d’une lumière perdue. Il suffit d’un seul instant de beauté pour tuer l’horreur du noir, la peur vide.
On invoque quand on doute. On doute quand on a perdu l’étincelle, propulseur de notre intelligence. Déconnectés d’elle, nous sommes ni plus ni moins que morts car plus rien en nous ne vibre. Et nous devons recommencer à danser, à chanter, pour que soudain le vibrato passe à nouveau comme un frisson dans le corps qui le rend à la vie.
Être manipulé par manque de Lumière
La religion, pratiquée par de moins en moins de gens, laisse l’individu avec un bagage de tics culturels qui retient la personne à un groupe. Le sentiment d’appartenance – normal chez les jeunes – ne devrait plus l’être chez les adultes.
Mais lorsqu’on est coupé de son étincelle, le sentiment d’appartenir à un groupe devient la seule force disponible. Nous l’acceptons même si elle n’est pas réelle, même si elle est traitre, même si elle ne nous relie pas à notre lumière propre. Jusqu’à ce que la souffrance du sens devienne intenable.
En psychologie traditionnelle, on étudie les comportements. Ils sont façonnés par la mimétisation de notre milieu familial, puis scolaire, puis national. Les comportements psychologiques sont étudiés par les spécialistes de marketing pour créer des sentiments d’appartenance artificiels. Croire que notre identité est strictement reliée à un conditionnement culturel, à une croyance religieuse, c’est réduire la grandeur de l’être humain à un animal-pensant. C’est le rendre hautement manipulable. Contre cela, il n’y a qu’un remède, sortir du conditionnement.
Nos artistes ne travaillent pas pour créer une identité à la nation. Ils nous rappellent surtout à l’étude de ce qui sort du soi. Un artiste est en constante démarche vers son esprit, il décode son intelligence et la transmet dans un médium esthétique. Il ne pense pas à sa nation lorsqu’il crée. Il est occupé à être encore plus lui-même. Voilà pourquoi nos artistes sont importants. Non pas pour l’œuvre mais leur démarche. Les artistes nous rappellent de garder le fil de notre évolution toujours en connexion avec la lumière.
La seule raison pourquoi nous avons donné de l’importance à l’œuvre, c’est qu’elle rétribue l’artiste. Il peut ainsi gagner sa vie. Mais nous pouvons en dire tout autant de tout ce qui a créé notre économie. Combien de choses utiles et d’inutile, pour faire de l’argent. Ainsi va notre système pour l’instant.
Manifester une intelligence globale
L’identité n’a pas pour vocation de rassurer. Elle n’est pas un repère. Elle soutient l’intention de l’esprit à long terme.
Se mettre à nu, au-delà de toutes les coutumes, les rites, les costumes, les modes, les genres, fait vibrer notre être à sa lumière. C’est cela de l’intelligence.
De tout temps, les êtres ont eu besoin d’un directeur de conscience, incapables d’assumer seuls leur propre esprit. Même les personnages religieux n’avaient pas le niveau de conscience requis pour individualiser leur propre conscience, c’est-à-dire se savoir être sans permission morale supérieure, mais par sa propre intelligence.
Les élites religieuses ont soutenu et soutiennent encore ceux qui ont besoin d’un repère extérieur pour conforter leurs choix. Mais qui dit élite religieuse, dit risque d’abus de confiance, de domination. Héritiers du Siècle des Lumières, l’éducation nous a permis de mieux diriger notre conscience individuelle. Les puissances financières éprouvant plus de difficulté à manipuler le commun des mortels, font dorénavant appel aux élites religieuses pour à nouveau forcer nos élites politiques à les intégrer dans nos institutions nationales. Le sentiment d’appartenance facilite la manipulation de masse et la culpabilisation collective.
C’est ce que nous avons vécu au Québec, en tant que société croyante. Notre élite religieuse a abusé de notre conscience. Nous avons accepté de nous diminuer en tant qu’êtres au point d’avoir honte de nous-mêmes. Et nous étions des millions de personnes consentantes à subir cette Grande Noirceur. Puis, l’étincelle de notre identité nous a fait vibrer grâce à René Lévesque. De plus en plus de personnes ont réalisé qu’elles ne devaient pas se laisser porter par la voix d’une idéologie politico-religieuse, réconfortante pour le moi sacré mais aussi dévastatrice pour la qualité d’être soi que pour le vivre ensemble.
L’identité n’est pas un réconfort, mais une intelligence globale. Lorsque les artistes vibrent à cet esprit universel, une nation entière peut prendre conscience de la direction à suivre.
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